Miser sur des essences plus résilientes ne sera peut-être pas suffisant pour préserver les forêts des effets du réchauffement climatique. Deux études parallèles, menées par des chercheurs français du Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive (Cefe) et des équipes allemandes et chinoises, attestent qu'une grande diversité végétale est nécessaire pour maintenir le bon état du sol dont elles dépendent. Il s'agit plus précisément de garantir que la litière (la couche de feuilles mortes qui couvre le sol et l'alimente en carbone et en azote au fil de leur décomposition) témoigne de cette biodiversité. Le bon « recyclage » des deux éléments chimiques en question étant indispensable à la résistance et à la croissance des arbres et autres végétaux en présence.
Dans la première étude (1) , publiée dans la revue Proceedings of the National academy of sciences, des scientifiques chinois du Centre international du bambou et du rotin (ICBR) ont testé la résilience d'une variété de forêts asiatiques face à un stress hydrique forcé (en captant les pluies avant que l'eau n'atteigne le sol). Toutes les forêts, et donc les litières formées au sol, ne présentaient ni la même diversité végétale ni la même diversité d'organismes décomposeurs. Résultat ? « La combinaison d'une plus grande diversité végétale et d'organismes décomposeurs peut atténuer, voire entièrement compenser, les effets d'un climat sec sur le recyclage des éléments », affirment les auteurs de l'étude.
Ces observations ont par ailleurs été confirmées dans la seconde étude (2) , parue cette fois dans la revue Global Change Biology. L'équipe française s'est saisie, pour cela, des données d'une « des expériences sur la biodiversité les plus longues au monde ». Celle-ci, menée par la Fondation allemande pour la recherche (DFG) depuis 2002, analyse l'évolution des microclimats de plusieurs écosystèmes végétaux. Les chercheurs s'en sont servis pour simuler l'effet des variations de température sur les microclimats de forêt ou de prairie en fonction de la diversité végétale. Là encore, plus cette dernière est riche, plus elle « atténue les variations de température les plus extrêmes sur ses microclimats et favorise ainsi les processus écosystémiques, telle que la décomposition », nécessaires à la survie de l'écosystème. Une raison de plus, selon les scientifiques, de maintenir la plus grande biodiversité végétale possible dans les forêts.